Couleur, coloris, clinique et lobbying chromatique

Guy Lecerf

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Lecerf, G. (2019). Couleur, coloris, clinique et lobbying chromatique. p-e-r-f-o-r-m-a-n-c-e, 5.


J’interviens dans ce colloque intitulé « Art et clinique » en tant qu’artiste (peintre,  photographe) et chercheur (en poétique et esthétique chromatiques). Dois-je préciser que je n’ai aucune expérience institutionnelle de la clinique mais que, comme patient, j’ai une certaine expérience des lieux de santé ? De plus, je dirige des séminaires de master et de doctorat dans les domaines du design et de la coloration. A la suite de ces derniers, des étudiants sont devenus designer-coloristes et certains d’entre eux interviennent régulièrement dans des cliniques pour des projets de coloration.

Je vais m’appuyer sur certaines de leurs expériences, pour dire ce qu’évoque pour moi le mot clinique dans ses rapports à la couleur. Dans un premier temps, je m’appuierai sur les constatations de Noëlle Bernat pour aborder le métier de coloriste intervenant dans des cliniques. Pour l’essentiel, elle se demande qui arbitre dans les projets de coloration. Dans un second temps, je ferai référence à la thèse du Tunisien Mohamed Marrakchi portant sur les hôpitaux tunisiens qui, de plus en plus, s’inspirent des modèles hôteliers afin d’accueillir les patients étrangers, notamment Libyens.

Dans un dernier point, j’essaierais de savoir si la notion de couleur suffit à rendre compte de l’expérience chromatique que j’ai dans une clinique ou s’il ne faut pas envisager de retrouver là la notion, propre à l’art, de coloris. Dans le contexte de l’industrialisation de la santé et de l’hôtellerie, quels modèles chromatiques l’emportent ?

1 Designer-coloriste en clinique

En vue de cette communication, j’ai repris contact avec Noëlle Bernat, une ancienne étudiante du DESS Couleur et projet d’environnement,  devenue designer-coloriste. Elle est, en particulier, intervenue à la clinique Sarrus-Teinturier de Toulouse[1].

En fait, lors de notre rencontre, elle a souhaité m’entretenir des relations difficiles, parfois tendues, avec différents acteurs des projets de coloration : du maître d’ouvrage, payeur et décideur, des architectes soucieux de leur autorité, des artisans, des agents d’entretien et du personnel, enfin tout ce monde qui donne son avis ou, tout bonnement, en fait à sa tête.

Outre le poids des stéréotypes et du travail essentiel du motif (le relations entre le rouge, l’orange et le bleu), on n’a que peu évoqué la question de la couleur et, tout particulièrement, ce qui apparait comme essentiel voire thérapeutique dans les discours politiques et économiques en ce domaine : l’innovation. Or cette dernière concerne directement les projets de coloration des lieux de santé.

Dans cette perspective, je citerai comme exemplaire l’ouvrage récent de Sheila J. Bosch et Rosalyn Cama, The Application of Color in Healthcare Settings, publié en 2012[2].

Les fonctions remplies par les deux auteures résument assez bien les orientations actuelles en matière de R & D[3] et design chromatique. Sheila Bosch est directrice d’un département en Research & Innovation (société Greshen, Smith & Partners). Elle s’intéresse en particulier à tout ce qui relève de l’architecture, de l’environnement et du design des établissements de santé. Rosalyn Cama est, de son côté, designer d’espaces intérieurs (pour la société Cama) et préside aux destinées de l’Association américaine des Designers d’intérieurs (l’ASID).

Pour un chercheur, ce type d’ouvrage est précieux plus parce qu’il témoigne que par ce qu’il apporte de nouveau à la compréhension de la couleur. Il est précieux, tout d’abord, parce qu’il montre qu’une recherche sérieuse peut être menée en design chromatique, que celle-ci s’appuie sur des références précises, actualisées et que, de plus, celle-ci se doit d’être prudente en ce qui concerne la doxa en ce domaine : sur les relations supposées entre la couleur et l’affect et, plus encore, sur les effets thérapeutiques trop souvent admis sans preuve  de telle ou telle couleur :

« There is insufficient evidence to assert that specific colors can evoke a certain mood, nor is there a link that can be made between specific colors and health outcomes »[4].

Ce salvateur coup de balai dans tous ces lieux communs qui souvent font office de vérités, n’empêche nullement l’ouvrage de faire état de relations usuelles entre couleurs, fonctionnalité et plasticité de l’espace. « Color can create the illusion of a higher ceiling or a wider room or facilitate cueing in way finding orientation »[5].

Sont également précieuses les références scientifiques de ce discours de designer telles que les recherches sur la lisibilité et les contrastes de couleur dans le domaine du design graphique (Kousek et Hallebeck, 2011) ou les travaux sur la nomination des couleurs.

Outre ces données qui concernent les plateaux des colorations (ceux des schèmes et motifs chromatiques), outre les connexions entre les plateaux des couleurs et ceux des nominations, le designer-chercheur se trouve particulièrement intéressé par tout ce qui relève du marketing et, en particulier, la question des préférences. De ce point de vue, les études menées sur les affinités chromatiques des enfants en milieu hospitalier (Jin Gyn Philipp Park) intéressent Sheila Bosch et Rosalyn Cam. Le blanc et le jaune n’obtiendraient pas les faveurs du jeune public et, de plus, il n’existerait pas de notable préférence pour telle ou telle couleur. Un résultat qui, il faut bien l’avouer, ne facilite pas la tache du designer et du marketeur. Il faudrait, en plus de l’âge des patients, que soient prises en compte d’autres variables comme le genre, le contexte, les facteurs culturels sans compter des critères relevant plus précisément de l’expérience chromatique comme la teinte, l’éclairage ou la saturation. Un moyen de se sortir de ce qui peut apparaître comme un cul-de-sac épistémique serait de s’intéresser à l’image que donne une clinique. Blumberg et Devlin (2006) ont mené leurs travaux à partir de la comparaison de photographies ; ils ont interrogé cent adolescents. Il en résulte fort peu de choses, en définitive : ces adolescents préfèreraient les couleurs vives et le design inventif.

La question qui se pose vraiment est de savoir qui peut bien être intéressé par de telles recherches sur les relations entre couleur, langage, design graphique, design d’espace et sensibilités culturelles. La réponse est aisée à trouver : il s’agit de l’industriel, celui-là même qui parraine The Center for Health Design et commandite l’ouvrage dirigé par Bosch et Cama.

Dans le cas de la clinique, si l’enjeu est la santé, il faut bien admettre qu’il est également d’ordre industriel et économique. Il s’agit d’ailleurs ici de la société K.I. : « K » pour Krueger et « I » pour International. KI à laquelle il faut ajouter furnishing knowledge afin de faire comprendre et admettre que l’aménagement de salles d’hôpital comme d’ailleurs celui des bureaux d’affaire repose sur des connaissances singulières relevant de la recherche & innovation.

Au début des années 1940, l’entreprise Krueger fabrique des meubles métalliques dont les premières chaises pliantes, avant, dans les années 1970, de s’engager dans le marché du mobilier de contrat destiné aux institutions ainsi qu’aux collectivités. Avant de passer, dans les années 1990, d’une société de fabrication à une société de commercialisation d’aménagement de meubles de contrat, au point de devenir, actuellement, la référence mondiale dans le domaine du meuble de contrat. Ce parcours est intéressant car il exemplifie le passage de l’industrie de la production (ce qui concerne l’ingénierie) à la commercialisation (ce qui relève du marketing) à l’aménagement ce qui engage le designer-coloriste.

De plus, à chaque étape de cette évolution, le rôle attribué à la recherche est de plus en plus important et se situe dans une perspective d’innovation. Impliqué dans ce qui est devenue de la recherche-action, le statut du coloriste ne peut qu’évoluer.

2 Clinique, hôtel : anatomie de la couleur et image dupliquée

Ainsi en est-il de l’évolution du statut de coloriste-designer dont les domaines d’intervention concernent autant les cliniques que les hôtels.

C’est ce qu’a remarqué Mohamed Marrakchi dans le cadre d’un doctorat sur les hôpitaux tunisiens[6]. Dans cette étude, il a constaté que les hôpitaux de son pays évoluaient en fonction du « tourisme de santé » (chirurgie esthétique) et du manque cruel d’équipement des états  limitrophes (la Libye notamment). Coloration et conception lumière participent de cette nouvelle donne qui dépasse très largement les frontières de la Tunisie. En fait, elle s’avère internationale.

Plus encore que les aménagements, c’est l’image même des dispositifs de santé et d’hôtellerie qui est concernée par cette évolution. Or, entre image, couleur et clinique les connexions sont très nombreuses. La première connexion se trouve dans l’étymologie elle-même : couleur et clinique sont liées comme le lit et la chambre. Couleur vient, en effet, de la racine indo-européenne kel, kel-os[7], la couleur, la teinte, ce qui couvre. Kel qui ouvre également sur kel-n, la cellule (cela), la cave, le cellier, la chambre (cella). Or, toujours étymologiquement, klinikos met un lit au centre ce cette chambre : klinikos dérive de kline, le lit, avant de désigné le malade qui reste au lit.

Cette origine étymologique ne présenterait qu’un intérêt anecdotique si l’histoire même de la théorisation de la couleur n’était passée par une chambre devenue célèbre : celle d’Isaac Newton. C’est en effet dans sa propre chambre que Newton fait l’étude clinique de la lumière et de la couleur. Clinique dans le sens de ce que Michel Foucault (Naissance de la clinique[8]) appelle la méthode anatomo-clinique. Foucault précise que l’invention de la clinique passe par « la dissection souveraine du langage et du regard ». C’est d’ailleurs cette dissection de la lumière par Newton qui a tant déplu à Goethe. Le dispositif de l’experimentum crucis est connu : une paroi de chambre servant de diaphragme, les prismes découpant le rayonnement solaire transperçant le diaphragme par une petite ouverture, le spectre projeté sur un écran. Et l’instauration d’un plateau spécifique des couleurs reliant le spectre à des mesures d’angles ainsi qu’à des nominations (les sept couleurs de l’arc-en-ciel). Nous héritons de cet abord anatomo-clinique de la couleur. La preuve en est qu’à la suite du travail de Newton, le graveur Jacob Chritoph Le Blon invente ce qui deviendra la quadrichromie. L’objectif était de retrouver, par la gravure, « l’harmonie du coloris » par des moyens mécaniques. La sélection se fait alors à l’œil : on ouvre et analyse les couleurs comme on ouvre et analyse les corps[9]. Et ce bien avant les scanners et les innovations technologiques actuelles. La finalité est bien la duplication du coloris des images à partir de la sélection des couleurs et, en conséquence, des encres associées lors de l’impression.

En faisant un bond dans l’histoires des couleurs et des techniques, passant de la duplication encore bien artisanales à la production industrielle actuelle des images, s’impose des modèles  comme le Pantone[10]. A-t-on pour autant quitté la sphère de la clinique, de la santé et de l’hôtellerie ? Aucunement.

« The use of colour and graphic images may be vital factors in healthcare design. »[11]

Pour Sheila Bosch, Rosalyn Cama, et donc Krueger, l’aménagement comprend tout autant le design d’espace que le design graphique et l’image que va donner l’espace ainsi designé.

C’est alors que l’industriel Pantone peut intervenir. Non seulement en dupliquant des images mais en suggérant un mode de conception de la couleur dans des espaces ayant un « air de famille »[12] (du point de vue de l’industrie) comme ceux de la santé et de l’hôtellerie.

Or, le premier Pantone, est un nuancier regroupant des « colour chips ». Ceux-là même qu’on retrouve lorsqu’il s’agit, par exemple, de choisir par l’intermédiaire d’une image une couleur du PVC pour le sol d’un hôpital. Ceux-là même qu’on redécouvre à l’hôtel Pantone de Bruxelles, exemplaire de ce point de vue puisqu’il exemplifie parfaitement l’étroite connexion entre l’image et l’aménagement, tous les deux pantonisés. Car il s’agit bien de cela, de pantonisation. Bien loin des figures tutélaires de Newton et de Le Blon, s’imposent l’industrialisation et le business de la couleur.

Comment définir les chips ? Ce ne sont nullement des échantillons au sens que leur donne Nelson Goodman. Pour ce faire les chips devraient être extraits d’un milieu singulier dont ils exemplifieraient les propriétés les plus typiques de la teinte, de la texture ainsi que leur composition physique[13]. Ce qui, à la différence de tels échantillons, ils ne font pas.

Du point de vue sémiotique, celle de Peirce, ils seraient plutôt des représentamen[14]. Pour faire simple, les colour chips sont des images de couleur quasi irréelles, abstraites participant de cette vaste fantasmagorie analytique de l’ingénierie, du marketing et du design chromatique. Ces chips peuvent se classer et donner lieu à une analyse domaniale des couleurs : les familles de rouges, des oranges, des blancs, des jaunes, des verts et des couleurs chaudes ou froides. Cette analyse domaniale est rendue possible par la connexion des plateaux des couleurs avec celui des nominations.Par ailleurs, ce qui n’est nullement une banale acception, les chips sont des jetons destinés aux jeux de hasard (comme le poker). Autrement dit, les chips sont non seulement des éléments abstraits qu’il est possible de classer en domaines de couleur mais se sont également des éléments de jeu où le hasard compte.

La question est maintenant de savoir ce qui l’emporte, la programmation par la gestion des domaines de couleur ou le hasard qui laisserait espérer une possible liberté de choix.

Ce qui se passe dans l’aménagement d’espaces offre un début de réponse à cette interrogation. Il en est ainsi de l’application proposée par la société Sherwin-William, Chip it[15], qui va dans ce sens puisque tout un chacun peut s’adonner à une liberté illusoire, jouer avec une image quelconque, singulière, en extraire un chip et l’utiliser en vue d’un projet de coloration.

Test de l’application Chip it : à gauche la photographie, à droite les chips proposés.

J’ai testé cette application avec Noir désir un soir d’été, l’une de mes photographies en ligne[16]. Le jeu est apparemment libre puisque je choisis l’image et sélectionne ensuite le carré de couleur que je désire. Sauf que, une fois ces actions effectuées, il m’est proposé une gamme de chips de couleurs nommées et référencées par la société Sherwin-William, industriel de la peinture. Voilà donc un jeu de marketing élémentaire : donner l’impression au futur client qu’il peut choisir parmi une infinité de possibilités, comme dans un jeu de hasard, alors qu’il est attendu sur un plateau de produits restreint éminemment programmé par ses marketeurs, ingénieurs et designers-coloristes.

Dans le cas de l’hôtel Pantone de Bruxelles[17], c’est la capacité de programmer toute coloration qui est exemplifiée. Lorsque le designer Michel Penneman définit son concept, il précise que l’hôtel doit permettre de comprendre une analyse de la couleur, de l’étagement de l’hôtel en sept couleurs à la disposition des Pantone chip’s décomposant les couleurs de grandes photographies dans les chambres. Autrement dit, l’hôtel est là pour mettre l’image de Pantone ou plutôt la conception de l’image de Pantone en valeur comme il sait le faire en publicité, graphisme, photographie et tout ce qui fait image en définitive jusqu’aux produits dérivés.

3 Clinique et expérience poétique du coloris

À l’hôtel Pantone, tout le dispositif intérieur du hall d’accueil aux couloirs menant aux chambres se doit de même faire image. Ce dispositif est désigné par Michel Penneman comme étant un lobby. Ce qui peut paraître curieux puisque ce terme est associé, dans le langage courant, à des groupes de pression défendant leurs intérêts propres. Mais, à bien y réfléchir, ce n’est pas aussi incongru que cela : le lobby de l’hôtel sert en effet à faire pression sur ses clients ainsi que plus largement sur ceux qui en entendent parler dans les organes de presse.

Etymologiquement le lobby est un couloir, un lieu de passage (associé à l’anglais lodge ainsi qu’au français loge). Historiquement, il s’agit du hall dans lequel les courtiers de la Bourse n’ayant pas accès à la corbeille faisaient tout leur possible pour, malgré tout, participer aux bénéfices de la Bourse.

Pour en revenir à l’hôtel (comme à bien des cliniques contemporaines), la partie publique de l’intérieur du bâtiment, du hall jusqu’aux chambres en passant par les couloirs est considérée comme un dispositif spécifique, global et surtout stratégique, un lobby space : « The character and function of a lobby space often influence a visitor’s first impression upon entering a building »[18]

Cette première impression relève, à mon sens, d’une nouvelle modalité de l’expérience chromatique : celle, globale, du coloris. Un terme archaïque pour une notion actuelle  lorsqu’il est question d’une immersion dans des lieux de passage, dans le lobby d’un hôtel ou celui d’une clinique. Pour comprendre le sens de cette notion, il faut se référer à l’expérience chromatique proposée par l’art, notamment par la peinture à partir du XVIe siècle italien. C’est en effet à cette époque qu’ont été séparées les couleurs du coloris. Alors que les couleurs seront définies en termes matérielles (couleurs naturelles, couleurs artificielles), physiques (Newton) ou perceptifs (Hume), les artistes parlent alors de coloris lorsqu’il faut évoquer la dimension poétique de leur oeuvre. Le coloris pictural avait ses propres caractéristiques telles que l’union, la fraîcheur, la morbidezza et la vaghezza qui renvoient à une conception polysensorielle de la vision : l’union correspond à « l’harmonie du tout ensemble », à une conception synesthésique de la peinture, la fraîcheur, à l’éclat autant qu’à des évocations gustatives ou olfactives, la morbidezza à la douceur du toucher et la vaghezza à la fluidité,  à l’imprécision, jusqu’à l’immersion sensorielle. Autrement dit, le coloris possède fondamentalement des dimensions synesthésique et polysensorielle. Ce qui n’est pas (ou plus) le cas de la seule couleur définie par la production, le marketing mais aussi par les sciences qui ne voient plus en elle qu’une « modalité » parmi d’autres.

Si au plan de l’expérience chromatique, la distinction se comprend, le problème est que le terme de coloris soit pratiquement évincé au profit exclusif de couleur, colour, color.

Et pourtant le terme de couleur ne peut combler ce vide laisser par cet absent fantasmatique, Dans le cas des color chips, il ne peut même pas rendre compte d’une expérience de la coloration. Ce qu’admettent sans réserve Sheila Bosch, Rosalyn Cama, les auteures de The Application of Color in Heathcare Settings :

« Much of what we think we know about color is anecdotal. The results of many color studies that are often quoted have done in laboratory setting or using color chips representating basic primary colors. This is very different than the experience of color on walls in an interior environnement »[19].

A défaut de la notion singulière de coloris, du mot lui-même, ce qui persiste dans certaines pratiques de l’image (comme le cinéma d’animation[20], la tendance), ce sont des expressions comme « ambiance », « atmosphère », « climat », « aura » ou des termes anglo-saxons comme colorscript ou chromatic universe. Leur mérite cependant est d’explorer des voies essentielles de l’expérience chromatique, celle de la coloration, des motifs  et celle d’un mode de penser poétique et polysensoriel attaché jusque là au coloris.

Hôtel Pantone, Bruxelles, 25 avril 2014.

Je conclurais sur cette photographie prise lors d’un séjour dans l’hôtel Pantone de Bruxelles ;  dans une chambre qui poursuit l’aventure commencée dans celle de Newton, une chambre tout à la fois de vie, d’expérience chromatique, d’analyse et d’immersion dans la couleur. Un peu comme les espaces de train, d’automobile ou d’avion, tous ces espèces d’espaces de « transport en commun », les espaces de santé, d’hôtellerie, de bureau et ceux, en définitive, de la doma, les espaces s’enchainent de plus en plus et possèdent entre eux, sans véritablement se ressembler, un indéniable « air de famille ». Il ne s’agit pas tant d’être « comme chez soi » mais partout comme à l’accueil d’un hôtel ou d’une clinique. Des espaces dans lesquels le design l’a emporté, en étroite collaboration avec l’ingénierie et le marketing. Des espaces dans lesquels un mode de penser-design s’accompagne d’un penser-classer en terme de chips et poursuit sa diffusion au sein d’un lobbying chromatique toujours plus présent.


Notes

[1]           Images de la coloration de la clinique Srarus-Tenturiers : ww.biennaitre-rivegauche.fr/presentation.html#&panel1-4

[2]           Sheila J. Bosch, Rosalyn Cama,  The Application of Color in Healthcare Settings, Concord, Californie, The Center for Health Design, 2012.

[3]           Recherche & développement

[4]           Sheila Bosch, Rosalyn Cama, Op. Cit., p.8.

[5]           Sheila Bosch, Rosalyn Cama, Op. Cit., p.8.

[6]           Mohamed Marrakchi, « Couleur et conception lumière dans l’architecture hospitalière tunisienne : approche esthétique et poïétique », université de Toulouse, 2013, direction Guy Lecerf.

[7]           American Heritage Dictionary: http://web.archive.org/web/20080211183126/http://www.bartleby.com/61/IEroots.html

[8]           Michel Foucault, Naissance de la clinique, Paris, PUF, 1963.

[9]           Florian Rodari, Maxime Préaud, Anatomie de la couleur, l’invention de l’estampe en couleur,  Paris, BNF, 1996.

[10]         www.pantone.com

[11]         Sheila Bosch, Rosalyn Cama, Op. Cit.,, p. 43.

[12]         Ludwig Wittgenstein, Cahier bleu, trad. Marc Goldberg, Jérôme Sackur, Paris, Gallimard, 1996. François Noudelmann, Les airs de famille : une philosophie des affinés, Paris, Gallimard, 2012.

[13]         Guy Lecerf, Le coloris comme expérience poétique, Paris, L’Harmattan, 2014, pp. 91-94.

[14]         « Un signe, ou representamen, est quelque chose qui tient lieu pour quelqu’un de quelque chose sous quelque rapport ou à quelque titre. Il s’adresse à quelqu’un, c’est-à-dire créé dans l’esprit de cette personne un signe équivalent ou peut-être un signe plus développé. Ce signe tient lieu de quelque chose : son objet. » C. S. Peirce, Collected Papers, 1897.

[15]         http://www.sherwin-williams.com/homeowners/color/color-selection-tools/

[16]         http://www.artlimited.net/agenda/guy-lecerf-noir-desir-soir-ete/fr/157257

[17]         Pour des images consulter : http://www.pantonehotel.com

[18]         Cecily Channel, Lobby, 2010. “The lobby space type includes foyers, entries to halls, and security screening areas at or near the entrance to a building or demarcated space, and are meant to welcome and direct tenants and visitors, control access, and provide exit ways from buildings. This space type is often designed with both secure and non­secure areas. Building lobbies often serve as the “public face” of building interiors. The character and function of a lobby space often influence a visitor’s first impression upon entering a building. Key design concerns for this space type include balancing aesthetics, security, and operational considerations. “ Cecily Channel, National Institute of Building Science Whole Building Design Guide.

[19]         Sheila Bosch, Rosalyn Cama, The Application of Color in Heathcare Settings, p.9.

[20]         Pixar Animation Studios. Catalogue de l’exposition Pixar, 25 ans d’animation, Art ludique, Paris, 2014.


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