Maléfique : Le Pouvoir du Mal de Joachim Rønning
Elliott Lefebvre
Une véritable réflexion sur la nature humaine à travers un conte de fées
Maléfique : Le Pouvoir du Mal traite de la confrontation de deux mondes voisins, la Lande où vivent les créatures féériques de la forêt et Ulstead, le monde des Hommes, au centre duquel se dresse leur majestueux château qui dompte toute nature environnante pour ne laisser place qu’à une architecture impressionnante et sans défaut. Le film tourne autout d’une confrontation passive au début, à travers une distance clairement marquée entre les deux mondes par une rivière sans pont pour relier les deux rivages. Alors qu’au début le « démon » du film peut être associé à Maléfique du fait de sa nature agressive, son aspect démoniaque et ses airs froids, tout au long de l’intrigue le spectateur va progressivement se rendre compte qu’il en est tout autrement.
Ce film traite véritablement de la nature de l’Homme, à travers des métaphores distinctes qui prouvent tout son potentiel dangereux. Dès le début du film, on se retrouve évidemment confronté à la peur qu’éprouve l’Homme envers l’inconnu, du fait que nul n’ose s’aventurer dans la Lande excepté un petit groupe de mercenaires payés pour prendre ce risque. Ce petit groupe n’a pour but que d’attraper un genre spécifique de créature se développant dans la Lande et de ce fait, ils se rendent coupables vis-à-vis de leurs voisins d’un vol, voire même directement d’un kidnapping, sans regrets, initiant ainsi un véritable trafic d’êtres vivants.
Dans le film précédent, Maléfique (incarnée par Angelina Jolie) avait d’abord ensorcelé Aurore (incarnée par Elle Fanning) avant de briser la malédiction pour l’élever comme sa propre fille. Maléfique faisant partie de la Lande malgré son isolement par rapport au reste de la population, c’est elle qui a fait le premier pas, bien que probablement involontaire, vers l’union des deux mondes, puisque c’est de sa fille dont le prince du château d’Ulstead tombe amoureux. Cet amour interdit se veut comme la promesse de l’union des deux mondes, le père du prince lui-même y étant particulièrement attaché. La Reine quant à elle, cache bien son jeu tout au long du film, tirant les ficelles dans l’ombre et préparant une guerre de très grande envergure.
La Reine Ingrith (incarnée par Michelle Pfeiffer) peut être assimilée à la nature violente et rusée de l’être humain. Dès le début du film, elle est présentée comme telle car, dans la première scène dans laquelle elle figure, on la voit contempler des armes et saisir une arbalète en se retenant de tirer sur son propre époux qui prône la paix entre les deux mondes. A l’arrivée de son fils dans la salle, elle jette son arme dans les bras de Gerda (incarnée par Jenn Murray), celle qui fera figure de complice tout au long de l’intrigue. L’arbalète tire alors involontairement une flèche allant se ficher dans la tête d’une statue représentant une créature noire, pouvant être assimilée au Phénix, figure qui représentera Maléfique plus tard dans le film. C’est en effet Gerda qui tirera la première bille de fer dans Maléfique.
Le fer. C’est bien là la représentation parfaite de l’évolution constante de l’être humain en matière d’armement, qui n’a eu de cesse de perfectionner ses armes au cours de l’Histoire jusqu’à frapper aux portes de l’apocalypse avec l’arme atomique. Au-delà de traiter de l’impact humain en terme d’armement et de destruction, le film fait également allusion à la destruction de la nature par l’être humain puisque les créatures de la Lande sont particulièrement vulnérables au fer, et lorsque le laboratoire secret d’Ingrith met au point une poudre rouge détruisant instantanément des fées, celles-ci retournent à l’état de vulgaires plantes inanimées. Sous la main de fer d’Ingrith, l’armée entière d’Ulstead est mobilisée pour combattre les créatures de la Lande en utilisant tout un arsenal avancé et destructeur auquel leurs victimes n’étaient absolument pas préparées.
L’Homme voyant le démon partout, est incapable de reconnaître qu’il devient lui-même le démon au travers de son potentiel destructeur avec lequel nul ne peut rivaliser.
C’est le Prince lui-même (incarné par Harris Dickinson) qui s’opposera finalement à la Reine lorsqu’il comprend qu’elle a manipulé le peuple humain entier pour combattre et détruire les fées, s’interposant au coeur du combat pour réunir les deux armées opposées et en finir avec cette guerre, par une paix entre les deux mondes qui n’a malheureusement pu se faire sans nombre de pertes de chaque côté.
Le film regorge de métaphores différentes qui traitent de plusieurs aspects distincts de l’être humain, nous donnant ainsi des leçons sur notre propre nature au travers d’un conte de fées palpitant aux effets spéciaux brillants et captivants. L’alliage d’une philosophie humaine et d’une intrigue fantastique en fait un film puissant et mémorable, que je recommande à toutes et tous.
Réalisateur : Joachim Rønning
Producteur : Angelina Jolie, Duncan Henderson
Scénario : Linda Woolverton, Noah Harpster, Micah Fitzerman-Blue
Photo : Henry Braham
Musique : Geoff Zanelli
Montage : Laura Jennings, Craig Wood
Son : Niv Adiri
Interprètes principaux :
Angelina Jolie (Maléfique)
Elle Fanning (Aurore)
Harris Dickinson (Prince Phillippe)
Michelle Pfeiffer (Reine Ingrith)